Dans l'hémisphère nord, des stocks importants à prix bradés.
Les pays céréaliers de l'hémisphère sud sont sur les marchés alors que ceux du nord ont encore d'importantes quantités de grains à écouler d'ici la fin du mois de juin prochain.
Au début du mois de mars, l'Union européenne (UE) devait encore exporter 16 millions de tonnes (Mt) de blé et la Russie 18 Mt pour atteindre leurs objectifs de campagne. Face à eux, l'Australie écoule progressivement sa récolte (23 Mt). Sur le marché du maïs, les États-Unis auraient déjà vendu 38 Mt de grains sur les 54 Mt disponibles à l'export. Depuis la fin de l'hiver, ils sont concurrencés par l'Argentine (37 Mt exportables) et surtout par le Brésil (52 Mt exportables), si sa récolte estimée par l'USDA est bien de 124 Mt. Or, la FAO table sur 132 Mt et la société brésilienne d'approvisionnement (Conab) sur 114 Mt. Autrement dit, les capacités d'exportation du pays oscilleraient entre 45 Mt et 30 Mt. Toutefois, une partie des grains exportables pourrait aussi être distillée en bioéthanol.
La géopolitique défie les fondamentaux des marchés. Pour s'approvisionner en maïs, la Chine privilégie l'origine brésilienne depuis qu'elle a signé un accord phytosanitaire et commercial avec Brasilia. Pas moins de 17 Mt de maïs ont été vendues à l'Empire du milieu alors que les États-Unis n'en ont expédié qu'1,7 Mt. D'ici la fin de la campagne, Pékin devrait encore importer 7 Mt à l'origine pour l'heure encore inconnue. En conséquence, les États-Unis se rabattent sur leurs voisins américains. Environ 20 Mt de maïs ont été expédiées au Mexique. La Colombie est revenue sur le marché américain. En Asie, les États-Unis comptent toujours le Japon et la Corée du Sud parmi leurs clients les plus fidèles. Les prix très faibles des céréales achetées compensent en partie les coûts d'affrètement très élevés mais supportables. Toutefois, les États-Unis savent qu'ils vont achever leur campagne avec des stocks en forte hausse sur un an (55 Mt ; + 21 Mt). Aussi, moins de maïs pourrait être semé ce printemps.
Fin de campagne en Ukraine
L'Ukraine a déjà écoulé une bonne partie de ses grains exportables. Il lui reste à vendre 2,6 Mt de blé et 8 Mt de maïs. L'ouverture du nouveau corridor sur la Mer Noire rend l'accès aux marchés africains et asiatiques bien plus aisé que l'an passé. Toutefois, la traversée du canal du Suez reste dangereuse. Sur le marché européen, l'Ukraine a expédié 7,5 Mt de maïs depuis le début de la campagne, soit 2,5 Mt de moins que l'an passé. Le pays a disqualifié le Brésil en y livrant trois fois plus de maïs que le second. Quant au blé et à l'orge, ses ventes sont quasiment inchangées. En cette fin de campagne, la concurrence ukrainienne sera moins rude sur le marché européen, bien plus étroit que l'an passé. Toutes origines confondues, les Vingt-sept n'achèteraient que 17 Mt de maïs, soit 9-10 Mt de moins qu'en 2022-2023 (selon le Comité de gestion de cultures arables). L'Espagne est de loin en tête des pays importateurs (5,5 Mt essentiellement d'Ukraine). La France a cependant pâti de la concurrence ukrainienne. Au début de la campagne, FranceAgriMer prévoyait l'exportation de 7,5 Mt de blé et de 3,6 Mt d'orges en Union européenne. Après avoir raboté mois après mois ses prévisions, l'organisme public ne table plus que sur 6,2 Mt de blé et sur 3 Mt d'orges. Cependant, 10,1 Mt de blé et 3,4 Mt d'orges seraient exportées vers les pays tiers d'ici la fin de la campagne, soit au total 1 Mt de plus qu'escompté six mois auparavant. Mais seules 5,7 Mt de blé et 2,2 Mt d'orges ont été vendues. En ajoutant ses vingt-six partenaires européens, 21 Mt de blé et 5,6 Mt d'orges (y compris le malt) ont été expédiées vers des pays tiers. Or, l'UE s'est donnée comme objectif d'exporter 36 Mt de blé et 6,5 Mt d'orges d'ici la fin de la campagne. Mais, à ce jour, la France est quasiment le seul pays européen à avoir affrété des céréales vers la Chine (1,37 Mt de blé et 2 Mt).