Irrigation : la bataille de l'eau est lancée.
Lors du congrès de l'Association générale des producteurs de maïs (AGPM), les irrigants de France ont décidé de renforcer leurs moyens. Avec la ferme intention de ne pas se laisser dicter la stratégie future.
Les irrigants de France et leur président, Éric Frétillère vont pouvoir faire entendre encore plus leur voix. En effet, cinq associations spécialisées de la FNSEA* vont renforcer leurs moyens auprès des irrigants : " Nous ouvrons le chantier de la transformation d'irrigants de France, qui va prendre l'année, avec l'objectif absolu de mobiliser plus de ressource pour l'eau d'irrigation ", a annoncé le président de l'AGPM, Franck Laborde. Car l'enjeu, " c'est l'exploitation agricole et sa survie ", a soutenu Eric Thirouin, président de l'AGPB. Il souhaite d'ailleurs que les agriculteurs " s'arment juridiquement en s'appuyant sur l'intérêt général majeur " qui a été validé dans la loi d'orientation agricole. Ce qui permettra de faire face et de répondre aux " 70 juristes de la France Nature Environnement " qui ne cessent de multiplier les recours contre les projets de réserve de substitution. C'est d'ailleurs cette technique qui leur permet de modifier le droit à bas bruit en allant dans leur sens et de renforcer les contraintes qui pèsent sur les agriculteurs, a en substance estimée Carole Hernandez-Zakine, docteur en droit de l'environnement. Autrement dit, ce renforcement de moyens vise à contrer " les escrologistes et les Khmers verts ", selon l'expression de Geoffroy d'Evry, président de l'UNPT.
Conférence nationale sur l'eau
Le président des irrigants a également appelé à modifier la gouvernance de l'eau qui est aujourd'hui " une usine à gaz ". Les agriculteurs même s'ils n'irriguent que 7 % de la surface agricole utile, estiment être sous-représentés dans les instances, notamment dans les Agences de l'eau. Ce qui, en plus des recours systématiques, freine considérablement le développement des réserves de substitution. Cependant, " pas question de faire n'importe quoi et n'importe où en termes de stockage ", a prévenu Éric Frétillère, " favorable à ce que la politique de l'eau soit adaptée à chaque territoire ". Sur la gouvernance et le stockage Thierry Burlot, président du Cercle français de l'eau a abondé dans son sens : " On est passé du petit au grand cycle de l'eau sans se poser la question du financement, de la gouvernance. On est en train d'utiliser des instances historiquement environnementales pour régler des problèmes de planification économique ", a-t-il expliqué. " Nous ne sommes pas gouvernés, nous sommes dirigés ", a insisté Guillaume Chamouleau, président des irrigants de Poitou-Charentes qui plaide, comme Eric Frétillère et Thierry Burlot, pour la mise en place d'un secrétariat d'Etat chargé de la gestion de l'eau. Nombre d'intervenants sont intéressés par la grande conférence nationale sur l'eau promise par Michel Barnier quand il était Premier ministre. Une idée que François Bayrou a reprise fort timidement avant qu'elle ne s'évapore avec l'arrivée de Sébastien Lecornu. Beaucoup sont aussi favorables à une approche multi-usage de l'eau, à travers une politique de barrages. Ils permettent en effet de préserver et même de développer la biodiversité, de fournir de l'énergie, d'irriguer les cultures, de délivrer de l'eau potable aux usagers, d'offrir des espaces de loisirs... À condition toutefois de ne pas les développer à outrance comme en Espagne " où l'on stocke 50 % de ce qui coule ", a averti Éric Servat, hydrologue et directeur du Centre international Unesco sur l'Eau**. En France, seule 5 % de l'eau superficielle est stockée, dont une partie dans 3 millions de piscines privées, soit environ 210 millions de m3. La marge reste encore importante.