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La ressource en eau dans la Manche après la sécheresse 2022

Avec une sécheresse inédite, l'année 2022 a été une année particulière au niveau du contexte climatique.

Figure 2 : graphique représentant l'utilisation de l'eau prélevée par secteur. AEP : alimentation en eau potable
Figure 2 : graphique représentant l'utilisation de l'eau prélevée par secteur. AEP : alimentation en eau potable
© DR:

La Manche n'a pas été épargnée par le manque d'eau. Il est donc important d'identifier les différentes ressources en eau dans le département en comprenant leur fonctionnement pour pouvoir ensuite au mieux les gérer.

 

Évaporation, précipitation, ruissellement, infiltration :  le grand cycle de l'eau

Dans le grand cycle de l'eau, l'eau subit un phénomène d'évaporation. Elle quitte les océans, les lacs, les rivières et les plantes, on parle alors d'évapotranspiration, pour s'élever dans les airs et devenir vapeur d'eau. En rencontrant des températures plus basses, le phénomène de condensation survient. L'eau se condense en fines gouttelettes formant les nuages qui grossissent et finissent par tomber sous forme de pluie ou de neige, c'est l'étape des précipitations. Enfin, une partie de l'eau ruisselle sur le sol jusqu'aux rivières, fleuves et océans, l'autre partie s'infiltre dans les nappes phréatiques.

 

Eau potable, eaux usées : le petit cycle de l'eau

Après avoir été prélevée dans les cours d'eau ou captée dans les nappes souterraines, l'eau doit généralement subir un traitement plus ou moins complexe afin de devenir potable. De la même façon, les eaux usées sont traitées dans les stations d'épuration et débarrassées de leur pollution pour pouvoir être rejetées dans la nature, sans nuisance pour l'environnement. C'est ce que l'on appelle : le petit cycle d'eau. L'eau à potabiliser est prélevée si possible dans les ressources souterraines ou dans les ressources superficielles. Les eaux souterraines proviennent de l'infiltration des eaux de pluie dans une couche de terrain perméable. Situées entre deux couches de terrain imperméable, elles constituent alors une nappe aquifère, de qualité quasi constante, elles bénéficient également, vis-à-vis des pollutions, d'une meilleure protection que les eaux superficielles. Elles peuvent être captées à leur exutoire ou directement dans le sous-sol par forage. Les eaux superficielles sont alimentées par les eaux de pluie et le drainage des eaux souterraines. Elles doivent répondre à certaines exigences de qualité pour que le prélèvement y soit autorisé en vue d'une production d'eau potable.

 

LA MANCHE, UNE DIVERSITÉ DE TERRITOIRE

Le sud-Manche, le centre-Manche et le Cotentin sont les principaux territoires caractérisant le département de la Manche. Dans la Manche, nous pouvons distinguer :

o les terrains de socle ancien (granite, schistes et grès). Présents dans tout le sud-Manche et le nord-ouest Cotentin, ces aquifères (terrains perméables, poreux, permettant l'écoulement d'une nappe souterraine et le captage de l'eau), liés à la fracturation, sont généralement de faible extension et assez peu productifs. Les débits exploitables sont compris généralement entre 10 et 50 m3/h, plus importants dans le nord du département. L'alimentation en eau est souvent assurée par des prises d'eau de surface, sensibles à la sécheresse et aux pollutions accidentelles.

o les terrains sédimentaires du Secondaire. Localisés dans la partie est du Cotentin : la nature hétérogène des dépôts sédimentaires (sable, gravier, conglomérat, argile, calcrête) implique une variabilité forte de la productivité. Ces aquifères souvent superficiels sont très sensibles aux pollutions diffuses. Les débits exploitables sont compris généralement entre 50 et 75 m3/h.

o les terrains sédimentaires récents et meubles. Datant du Tertiaire-Quaternaire, limités au seul Isthme du Cotentin et à la frange littorale : les sables et faluns présentent une forte porosité qui permet le développement d'aquifère puissant et très productif. Les débits exploitables peuvent être supérieurs à 150 m3/h.

 

QUELLES SONT LES DIFFÉRENTES RESSOURCES EN EAU ?

Chaque année dans la manche, 60 millions de mètres cubes sont prélevés pour permettre l'alimentation en eau potable, l'abreuvement des animaux, l'irrigation et l'alimentation en eau de process d'industrie au travers de 280 points de prélèvements (voir figure 2). Plusieurs types de ressource sont exploités pour assurer ces prélèvements. Ainsi dans la Manche, 60 % des eaux proviennent de nappes d'eau souterraines (forages, puits, captages) et 40 % d'eau superficielle (prise d'eau en rivière). Néanmoins cette répartition est très variable d'un secteur à un autre et dépend de la géologie.  (Source SDEAU50). Les ressources en eau sont tributaires du sous-sol et ne sont donc pas réparties de manière homogène sur l'ensemble du département.

 

Les principaux enjeux pour la protection de la ressource en eau

o La préservation de la ressource en eau, d'un point de vue qualitatif (lutte contre les pollutions ponctuelles et diffuses, microbiologie et nutriments) et quantitatif (niveaux suffisants dans les nappes et des débits minimaux dans les rivières) pour maintenir les usages prioritaires comme l'alimentation en eau potable, les activités de conchyliculture et de pêche à pied, de pêche professionnelle, la baignade ainsi que l'agriculture.

o La lutte contre les risques, en particulier le ruissellement rural et les inondations.

o La gestion et la protection des milieux naturels comme la protection des zones humides ou encore la préservation du patrimoine naturel (réseau Natura 2000...).

 

Le changement climatique a et aura un impact dans les années à venir sur la ressource en eau sur divers aspects.

Si nous faisons un zoom sur l'aspect quantitatif, la Manche étant caractérisée par une forte façade maritime, les connexions entre la mer et les zones d'eaux douces deviennent des sujets très importants.

Quels impacts du changement climatique sur les biseaux salés ?

 

Frédéric Gresselin, Chargé de mission développement de la connaissance sur les milieux à la DREAL Normandie, explique ce que cela va impliquer :

« En Normandie, le changement climatique devrait, selon le scénario le plus vraisemblable, entraîner une modification du régime des précipitations avec une augmentation des cumuls pluviométriques en automne et en hiver. Les risques d'inondation par débordement des eaux souterraines devraient donc s'accentuer, notamment le long des côtes de faible altitude. Dans ces territoires, les écoulements souterrains sont en effet contraints par la présence de la mer, la vidange des nappes étant bloquée à marée haute. Ainsi, au fur et à mesure de l'élévation du niveau marin, les nappes y déborderont donc de plus en plus fréquemment et durablement. Les conséquences vont être nombreuses : inondation de bâtiments, accroissement des contraintes hydrauliques dans les marais littoraux, dégradation de routes et d'infrastructures enterrées. »

 

Un programme d'observation en cours : Rivages Normand 2100

L'impact du changement climatique sur les risques d'inondation par les nappes du littoral est actuellement étudié par l'équipe de l'Osur (Observatoire des sciences de l'univers de Rennes) dans le cadre d'un programme de recherches dénommé Rivages normands 2100. Ce programme est co-financé par l'Université de Rennes, l'Agence de l'Eau Seine-Normandie, l'État (Dreal) et par de nombreuses collectivités et syndicats de production d'eau. Les premiers résultats seront produits cette année. Ils viendront compléter les cartes d'aléas produites par la Dreal.

 

LE BISEAU SALé

Le programme porte aussi sur l'analyse de l'impact du changement climatique sur le risque de salinisation des aquifères littoraux. La forme que prend l'interface souterraine entre les eaux douces continentales et l'eau de mer, dénommée biseau salé, dépend du niveau altimétrique respectif de ces deux masses d'eau. Plus le niveau marin est élevé, plus l'interface se déplace à l'intérieur des terres. La géométrie du biseau salé dépend aussi de tous les aménagements ou usages qui tendent à abaisser le niveau des eaux douces en surface ou dans les aquifères (drainage, pompage, recalibration des cours d'eau...). Cette interface se situe en général à grande profondeur et la présence du biseau salé ne perturbe que rarement les activités de surface. Dans les marais maritimes, les massifs dunaires ou les alluvions estuariennes, de nombreux forages atteignent cependant le biseau salé. Pour ces forages, le risque de pomper de l'eau saumâtre augmente en été, lorsque les niveaux d'eau douce diminuent. Ce risque s'intensifiera dans le futur. En effet, du fait de l'élévation du niveau marin et de la baisse probable, en été, des niveaux d'eau douce (l'évaporation va augmenter), le biseau salé va progressivement migrer à l'intérieur des terres. Cette migration sera plus ou moins importante selon l'intensité du changement climatique elle-même et le type d'aquifère. Elle devrait être très limitée dans les grands aquifères productifs de Normandie orientale, mais pourrait atteindre plus de 1 000 mètres dans certains aquifères alluviaux comme ceux de la vallée de la Dives.

Le Bureau de Recherches géologiques et minières « Le BRGM » a consacré une étude à ce sujet. L'Osur constate pour l'instant qu'il n'y a pas d'indice tangible de salinisation dans les sites suivis dans le cadre du programme de recherche Rivages normands 2100 (trois le long de la côte ouest de la Manche, Isthme du Cotentin et estuaire de l'Orne).

Des problèmes de salinisation sont néanmoins observés ailleurs comme dans la vallée de l'Orne et de l'Aure, mais aussi dans le passé dans la vallée de la Seine. Dans ce dernier cas, la baisse des prélèvements a permis de retrouver un état original (eaux douces non salées).

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