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Pacte et LOA : la Normandie présente ses propositions.

Dans le cadre des concertations régionales menées sur le projet de Pacte et de Loi d'orientation et d'avenir agricoles (PLOAA), la Normandie a présenté le 27 avril, à la Préfecture de Rouen, la synthèse de ses travaux, en présence notamment de Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.

Michel Lafont, de la Cran, a animé la plénière de restitution, en présence de Sébastien Windsor, président de la Chambre d'agriculture
de Normandie, Clotilde Eudier, vice présidente de la Région Normandie, et Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire. Philippe Mauguin, PDG de l'Inrae, qui participe à cette concertation au national, a apporté un éclairage sur le travail de réflexion mené sur l'adaptation et la transition face au changement ...
Michel Lafont, de la Cran, a animé la plénière de restitution, en présence de Sébastien Windsor, président de la Chambre d'agriculture
de Normandie, Clotilde Eudier, vice présidente de la Région Normandie, et Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire. Philippe Mauguin, PDG de l'Inrae, qui participe à cette concertation au national, a apporté un éclairage sur le travail de réflexion mené sur l'adaptation et la transition face au changement climatique.
© Laurence Augereau

Menée en vue d'établir un projet de Pacte et de Loi d'orientation et d'avenir agricoles (PLOAA), la concertation de la région Normandie s'est achevée ce 27 avril par une plénière de restitutions devant un auditoire d'acteurs du monde agricole, en présence du ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, de Sébastien Windsor, président de la Chambre d'agriculture régionale, et de Clotilde Eudier, vice-présidente de la Région en charge de l'agriculture.

Au final 17 propositions émergent d'un long travail mené tambour battant par une centaine d'acteurs de la région (chambres d'agriculture, syndicats agricoles, interprofessions, établissements scolaires agricoles, collectivités, associations spécialisées du monde de l'emploi et de l'innovation, etc.) (voir encadré ci-dessous). Objectif de la LOA ?« Ce volet législatif doit permettre de répondre à la question du renouvellement des générations à horizon 2035 tandis que celui-ci se fait sous différentes contraintes ou de nouveaux horizons, en considérant les questions de souveraineté alimentaire, de dérèglement climatique et la nécessaire transition écologique », a rappelé en introduction le ministre, soulignant au passage la « nécessité de réfléchir territorialement » aux besoins agricoles, notamment en matière de dérèglement climatique, pour « tenir compte des spécificités régionales et apporter par la suite les accompagnements nécessaires ». La LOA, à horizon 2035, est accompagnée d'un Pacte d'avenir, à savoir d'un volet réglementaire.

 

LA NECESSAIRE RECHERCHE D'UN CONSENSUS

Parmi les 17 propositions priorisées par les acteurs de la région normande, six ont fait plus particulièrement l'objet d'un consensus. Elles regroupent trois thématiques, détaillées ci-après.

 

1 o L'adaptation et la transition face au changement climatique. Nicolas Declomesnil, vice-président de la Chambre d'agriculture du Calvados, et éleveur bovin lait au Reculey (14), s'est chargé de présenter les travaux conduits sur les deux thématiques suivantes :

o la nécessité d'amélioration ou de maintenir le taux de matière organique (MO) dans les sols agricoles pour s'adapter au changement climatique.

Partant du constat « terre à terre que le taux de matière organique (MO) des sols normands est plus faible en zone de culture qu'en zone d'élevage et qu'il y a une baisse de l'élevage et une hausse des cultures industrielles à faible retour de MO, les enjeux que nous avons relevés sont de piéger le carbone, d'améliorer la réserve utile des sols, de limiter leur érosion, puis de favoriser la biodiversité. »

« Les propositions normandes qui ressortent dans ce contexte sont de sensibiliser et de développer l'agriculture de conservation des sols (ACS) ; de systématiser l'analyse du taux de matière organique du sol (en sus des reliquats azotés) et de financer le surcoût par l'Agence de l'eau ; de former les agriculteurs aux pratiques qui favorisent la MO ; enfin, de valoriser les produits organiques. »

« In fine nos objectifs sont d'obtenir un rapport MO/argile supérieur à 17 % sur 90 % des terres cultivées (hors prairies) en 2035, puis que 25 % des exploitations soient en ACS à cette date » ;

 

o la sensibilisation, la formation et le diagnostic d'exploitation face au changement climatique.

« Le constat est que nos agriculteurs ont une formation insuffisante sur ce sujet malgré une offre existante ; que de nombreux Groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE) travaillent sur cette question en Normandie et qu'il existe un diagnostic Varennes de l'eau complet tout récent mais qu'il reste encore à valoriser. »

« Les enjeux portent sur les risques sanitaires et de prévention des maladies qui accompagneront le changement climatique et auxquels il faut que nous nous préparions, puis sur l'accroissement de la résilience de nos exploitations vis-à-vis du climat ».

« Les propositions que nous avons formulées sont de sensibiliser les agriculteurs mais aussi les conseillers ; de financer et de développer largement un diagnostic au changement climatique systématique à l'installation pour identifier les leviers et définir un plan d'action climat visant à l'adaptation et à l'atténuation de ce changement, puis d'utiliser les crédits carbone pour financer ce plan d'action. Enfin, de sécuriser la prise de risque des agriculteurs qui innovent » « Nos objectifs sont que 50 % des agriculteurs soient sensibilisés au changement climatique en 5 ans et qu'à l'échelle normande 750 diagnostics climat par an soient centralisés et comptabilisés. »

2 o L'installation et la transmission des exploitations.

Deux points sur cette thématique ont donné lieu à restitution.

o L'accompagnement et la transmission en polyculture-élevage. La restitution du travail sur ce point a été présentée par Marc Lecoustey, secrétaire de la Chambre d'agriculture de la Manche, et éleveur laitier au Plessis-Lastelle (50). En amont de cet exercice, Sébastien Windsor a toutefois rappelé quelques chiffres sur l'élevage normand : « la région a perdu en 6 ans 220 000 animaux. À ce rythme, il n'y aura plus d'élevage en Normandie dans deux générations ». Le constat est donc sans appel et particulièrement inquiétant comme l'a développé Marc Lecoustey : « Nous voyons une accélération de la déprise de l'élevage depuis 10 ans, et chaque jour l'élevage marque le pas. Maintenir des productions animales sur notre territoire c'est conserver de la valeur ajoutée en termes économiques et d'emploi, et cela nous permet de maintenir une autonomie alimentaire. Mais il faut aussi se rendre à l'évidence, les exploitations à céder sont confrontées à une absence de mises aux normes ».

« Les enjeux sont donc de favoriser l'installation en élevage, de maintenir les outils d'aval et d'amont puis d'assurer la souveraineté alimentaire ». « Les propositions normandes sont de simplifier les procédures ICPE des bâtiments et de créer un fonds de garantie ; de financer l'animation des échanges parcellaires ; de créer un fonds national d'envergure pour financer la mise en conformité réglementaire des outils et leur modernisation ; de favoriser le recours au service de remplacement en allongeant le congé de remplacement jusqu'à 35 jours (aujourd'hui il est de 14 jours) et le crédit d'impôt qui va avec à 7 jours ; un droit à l'essai pour ceux qui font le choix de l'installation ; une adaptation des normes mais uniquement après une étude d'impact. » « Notre objectif, très ambitieux, est de maintenir 100 % des exploitations d'élevage en Normandie, avec, il va de soi, différents modèles ».

 

o De nouveaux dispositifs d'accompagnement pour favoriser la transmission en agriculture.

Une restitution sur ce point a été présentée par Gilles Lievens, président de la Chambre d'agriculture de l'Eure, et éleveur allaitant à Bosguérard-de-Marcouville (27).

« Le constat que nous avons fait est qu'il faut anticiper la cessation des agriculteurs en âge de partir à la retraite. La Déclaration d'intention de cessation d'activité agricole (Dicca) n'est que très peu remplie par les cédants (200 sur les 1 200 possibles) et nous n'avons à la Chambre que très peu d'information sur le devenir de ces exploitations. Il y a un manque d'anticipation des cédants sur la préparation de leur transmission, de même qu'il n'y a pas d'incitation claire à la transmission. » « Les enjeux sont d'assurer le renouvellement des générations, de limiter les démembrements d'exploitation et de faire en sorte que pour un départ il y ait une arrivée. » « Nos propositions sont de fusionner le Point accueil installation(PAI) et le Point info transmission (PIT) pour faire un Point accueil formation installation transmission (Pafit) en le rendant obligatoire et gratuit pour les cédants. L'accompagnement de ces cédants, avec deux rendez-vous, permettrait un diagnostic de leur exploitation avec in fine une préconisation pour favoriser l'exploitation d'un jeune. Nous proposons deux dispositifs d'incitation à la transmission : de justifier de la réalisation du diagnostic pour solliciter sa retraite, puis de créer une dotation au cédant (Dac) s'il y a reprise par un jeune ». « Notre objectif est de préparer 100 % des futurs cédants à la transmission et la cessation d'activité ».

3 o L'orientation et la formation.

Cette thématique a donné lieu à deux restitutions sur les points suivants :

o Une sensibilisation des plus jeunes aux enjeux de l'agriculture, de l'alimentation et de la santé en intégrant ces sujets dans les enseignements.

C'est Jean-Yves Heurtin, président de la Chambre d'agriculture du Calvados et éleveur-polyculteur à Ouilly-le Tesson (14), qui s'est chargé de présenter le travail effectué.

Le constat là encore est clair : « 40 % des agriculteurs présents en 2019 devraient être à la retraite d'ici 2030 ; il y a un fort besoin de jeunes alors que les effectifs baissent en formation initiale agricole ; puis demeure un déficit d'image des métiers par méconnaissance du secteur. » « Les enjeux sont donc de faire connaître l'agriculture, d'inverser les représentations de favoriser l'orientation puis bien évidemment de susciter des vocations ».

« Nos propositions sont de créer un module de formation dédié à l'alimentation, l'agriculture et la santé, conçu par des professionnels qui connaissent le terrain, destiné à des élèves du primaire - pour la partie alimentation et santé -, du secondaire pour les enjeux économiques et environnementaux, en SVT comme en biologie, puis avec une visite d'entreprise et des témoignages de professionnels. Nous proposons également qu'il soit créé des ressources pédagogiques, que les équipes enseignantes soient formées et que l'on veille à ce que la communication qui sera faite soit bien le résultat du module d'enseignement que nous évoquons et pas simplement une vue de l'esprit des enseignants. » « Notre objectif est de toucher 100 % des élèves du primaire et du secondaire ».

 

o Le renforcement de la transmission de l'agroécologie aux nouvelles générations par la coopération entre enseignement et collectifs d'agriculteurs.

Le travail de restitution sur ce point a été présenté par Laurence Sellos, présidente de la Chambre d'agriculture de la Seine-Maritime, de l'EPL de Seine-Maritime Naturapôle, et éleveuse de poules pondeuses et de vaches laitières.

« L'idée aujourd'hui est de formaliser un lien concret entre le terrain, le quotidien des agriculteurs, et l'enseignement agricole. C'est bien évidemment de former les enseignants mais aussi les formateurs. Puis de montrer aux jeunes que l'agroécologie n'est pas un vain mot, que nous, les aînés, avons mis en route des choses dans nos fermes, et que, oui, c'est possible. ».

« Nos propositions sont une participation active des étudiants aux groupes GIEE et Dephy, en lien avec les Organismes nationaux à vocation agricole et rurale (Onvar) ; d'accroître les liens intergénérationnels entre enseignants et conseillers autour de la remise en cause des pratiques en construisant une convention nationale qui, d'une part formalise la place de ces dispositifs dans les programmes et, d'autre part, pérennise le financement des partenaires ». « Notre objectif est de pérenniser cette initiative normande et de faire en sorte qu'elle essaime partout sur le territoire ». « Nos jeunes demandent du concret, il faut y aller », a conclu Laurence Sellos.

 

DES TRAVAUX « INNOVANTS »

En conclusion de cette plénière normande, Sébastien Windsor a remercié l'ensemble des parties prenantes à ce lourd travail de concertation régionale. « Je souligne l'intérêt de ce bel exercice ». « Ce n'est pas très souvent que nous prenons le temps de prendre du recul par rapport à notre situation agricole, c'est encore moins souvent qu'on le fait de façon collective et encore moins souvent en essayant d'aller chercher des éléments de consensus sur les grandes priorités (...) » « Cet exercice-là doit nous conduire aussi dans nos travaux Chambre, en parallèle du débat national, à orienter nos politiques régionales ». Un propos que Clotilde Eudier pour la Région a approuvé, avant d'ajouter que « le point sur l'alimentation et la santé était important », de même que tout le travail a mené sur l'image du métier pour « positiver » sur les métiers agricoles.

De son côté, après avoir rappelé en toute fin le calendrier du PLOAA, le ministre a dit retenir en particulier pour la région Normandie « les propositions sur le parcours du cédant, celui du portage capitalistique de l'exploitation, et le point développé sur l'enseignement qui vise à savoir comment on parle de l'agriculture aux jeunes ». o

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